Les infirmiers libéraux ont des masques à disposition, mais ils doivent les payer cher, alors que l’épidémie de Covid-19 se poursuit.
Au début de la crise sanitaire, la situation était particulièrement difficile pour ces professionnels de santé qui se déplacent au domicile de leurs patients.
« Nous recevions plusieurs centaines d’appels d’infirmiers qui cherchaient des masques et des blouses », témoigne auprès de Merci pour l'info Wilfried Kalfon, infirmier et dirigeant d’une entreprise de vente de matériel sanitaire à Marseille. « Des infirmiers libéraux passaient leurs journées de repos à chercher des masques et des blouses. Et des services de réanimation nous sollicitaient aussi », souligne-t-il.
Forte hausse des prix
« Mon épouse et moi, nous avons travaillé 16 à 17 heures par jour, mais nous nous étions derrière notre bureau, contrairement aux infirmiers, qui étaient épuisés par le stress et par la peur d’attraper le virus. J’ai 48 ans, la période m’a fait penser à celle des débuts du sida, où les gens avait peur de toucher les autres par peur de la contamination », se souvient Wilfried Kalfon.
La peur et la quête de matériel de protection ont bénéficié aux fabricants et aux transporteurs important les produits. « Lorsque nous avons commandé des masques par avion depuis la Chine, nous avons découvert que le prix à régler a été multiplié par 1,86 en raison du transport », raconte l’entrepreneur.
Des malfrats ont profité d’un besoin vital : important des masques, Wilfried Kalfon a constaté au moment de la réception que certains ont été volés au cours du transport.
En raison de la forte demande, les magasins proposant des masques en France ont vendu facilement leurs produits, ce qui a fait bondir les prix. Les montants ont baissé autour du mois de mai, « quand les grandes surfaces ont pu se procurer des masques », observe Wilfried Kalfon.
Les infirmiers libéraux devaient bénéficier de dons au début de la crise sanitaire, regrettait la présidente d’un des syndicats de ces professionnels, Infin’idels. « Nous avons fait appel à des vétérinaires, à des animaleries et à des magasins de bricolage pour obtenir des masques », expliquait le 25 mars à Merci pour l'info Michelle Droin. Ces dons constituaient un pis-aller : les matériels obtenus par ce biais permettaient une protection insuffisante.
Cette dépendance à la générosité a pris fin : les infirmiers peuvent donner des masques aux personnes dans le besoin, dans le cadre d’actions mises en place notamment à Béziers et à Marseille, nous indique désormais Michelle Droin, qui exerce son activité dans l’Aude et les Pyrénées-Orientales et se fournit auprès de Wilfried Kalfon.
5 € environ par masque FFP2
Mais le niveau des prix des masques FFP2 pénalise toujours ces professionnels. « Les prix sont très chers, ils atteignent environ 5 €, alors même que nous ne pouvons garder ces masques que trois ou quatre heures, déplore la présidente du syndicat Infin’idels. Les masques avec un filtre rechargeable sont encore plus onéreux. »
Selon l’Ordre national des infirmiers, la durée de protection du masque FFP2 est comprise « entre 3 et 8 heures », mais son port « est difficilement supporté au-delà de quelques heures ».
« Une fois mis en place, le masque ne doit plus être touché. Une fois enlevé, il ne doit pas être réutilisé. Il doit être changé immédiatement en dehors de la présence du patient, chaque fois qu’il est souillé, mouillé, ou mal positionné sur le visage », est-il recommandé sur le site de l’Ordre.
Quand les infirmiers libéraux doivent se rendre chez une personne non atteinte du Covid-19, ils doivent au moins se munir d’un masque chirurgical et éventuellement de gants. Les contraintes matérielles sont plus importantes en présence d’un patient malade du coronavirus.
« Lorsque nous allons faire des piqûres chez un patient ayant le Covid, par exemple pour des injections d’anticoagulants ou des prises de sang, nous recevons quelque 7 €, le tarif fixé par l’assurance-maladie », rappelle Michelle Droin. Ce montant ne permet pas de couvrir les frais que doivent régler les infirmiers libéraux, contraints de payer d’autres dépenses en matériel.
« Nous devons utiliser différentes protections : un masque FFP2, une surblouse, des gants, des surchaussures et, sur la tête, une charlotte, détaille Michelle Droin. Ces protections sont nécessaires pour éviter une surinfection du patient et éviter que nous attrapions nous-mêmes le Covid et que nous contaminions nos autres patients. »
Durant les actes qu’ils pratiquent, les infirmiers sont amenés à toucher les patients et à les aider à se rhabiller, ce qui multiplie les risques.
Les défauts de la dotation en masques chirurgicaux
Certes, des pharmacies fournissent gratuitement aux infirmiers libéraux des masques chirurgicaux sur présentation de la carte professionnelle, à raison d’une vingtaine par semaine en général.
Mais, poursuit Michelle Droin, des officines « peuvent refuser d’en fournir aux infirmiers remplaçants. Les titulaires doivent alors leur en donner sur leur dotation personnelle. En outre, les masques chirurgicaux peuvent vous protéger lorsque vous faites vos courses, parce que vous pouvez respecter la distanciation physique, mais ils ne protègent pas suffisamment les professionnels de santé. »
Les prix des masques vont diminuer, estime Wilfried Kalfon, qui se veut optimiste. « La tendance est clairement à la baisse des prix, constate-t-il. Les montants vont continuer à reculer, ce qui va épurer le marché : les acteurs qui étaient arrivés pour se faire de l’argent vont le quitter. En conséquence, on va revenir en mars prochain au niveau du début d’année 2020. » La spéculation sur les masques va prendre fin.
« Pénurie mondiale de gants »
Le manque de gants de protection à disposition des professionnels de santé persiste. Ces derniers « souffrent d’une pénurie mondiale de gants, ce qui est un problème récurrent, même dans le milieu hospitalier », observe Michelle Droin.