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Interdire les emplois sensibles aux binationaux : pourquoi la mesure du RN pourrait être inapplicable

Interdire les emplois sensibles aux binationaux : pourquoi la mesure du RN pourrait être inapplicable © Reuters / Reuters Connect

Publié le par Émilie Pelloux

Le Rassemblement national, par la voix de son président, Jordan Bardella, a indiqué vouloir exclure de certains postes stratégiques sensibles les citoyens français binationaux. Une proposition qui fait des émules. Mais est-elle seulement réalisable ?

La proposition a fait choc. Lors d’une interview accordée par Sébastien Chenu à TF1, le député du Rassemblement national a annoncé que son parti souhaitait empêcher les citoyens binationaux d’avoir accès à des « emplois extrêmement sensibles ». Une mesure confirmée quelques heures plus tard par le candidat au poste de Premier ministre, Jordan Bardella, lors d’une conférence de presse détaillant le programme du parti en cas de victoire aux législatives.

« Nous entendons réserver un certain nombre d’emplois stratégiques dans les secteurs notamment liés à la sécurité et à la défense exclusivement à des citoyens français », a déclaré le président du parti d’extrême droite. Une mesure destinée à « se protéger des tentatives d’ingérence orchestrées par les États étrangers », a précisé Monsieur Bardella. Agacée par les critiques faites à l’égard de la déclaration du candidat du RN, Marine Le Pen a précisé sur X que « la restriction ne concernerait que quelques dizaines d’emplois très sensibles dans des postes stratégiques en matière de défense, de nucléaire ou de renseignements par exemple. Cette courte liste serait revue très régulièrement en fonction de l’actualité géopolitique et de ses conséquences pour notre pays ».

Des entretiens d’habilitation pour les binationaux ?

S’il indique que cela se fera « sans remettre en cause la double nationalité », de nombreux fonctionnaires d’état binationaux, ainsi que certaines personnalités politiques, ont dénoncé les propos du président du RN. Pourtant, la pratique « existe déjà », a admis Marine Le Pen ce mardi 25 juin sur RTL. Une information confirmée par le ministre de l’Intérieur le même jour sur Europe 1. Gérald Darmanin a indiqué que les membres de son cabinet étaient eux-mêmes soumis à des entretiens d’habilitation prenant en considération « leurs faiblesses ». « Ça peut être une binationalité, bien évidemment, ça peut être aussi l’argent, ça peut être aussi une faiblesse familiale », a énuméré le locataire de la place Beauvau.

Chose importante à préciser : les emplois de fonctionnaires sont effectivement accessibles aux détenteurs de la nationalité française – incluant donc les binationaux. Y compris pour les emplois dits de « souveraineté », c’est-à-dire liés aux fonctions régaliennes de l’État comme la défense, la diplomatie ou la sécurité. « Dans les emplois très sensibles, comme au ministère de l’Intérieur, dans les armées, ou dans les services de renseignement, le fait d’être binational peut poser problème, même si ce n’est pas officialisé », indique Jean-Paul Markus, professeur de droit administratif auprès du Figaro. Mais la décision est prise au cas par cas et n’est donc pas généralisée en étant intégrée à la loi suprême.

Une proposition anticonstitutionnelle ?

Marine Le Pen entend néanmoins faire entrer cette pratique « dans la Constitution ». Sébastien Chenu a précisé que la mesure entrerait en vigueur par la voie « une loi organique et un décret ». Mais de nombreux juristes considèrent que la proposition est anticonstitutionnelle. « Distinguer les Français en fonction du mode d’acquisition de leur nationalité – de sol, de sang, naturalisés – romprait avec le principe d’égalité », explique ainsi Anne-Charlène Bezzina, maître de conférences en droit public auprès de Public Sénat.

Pour rappel, les binationaux sont détenteurs de la nationalité française au même titre que leurs concitoyens n’ayant que la nationalité française et jouissent des mêmes droits. Si le RN arrive en tête aux législatives, près de 3,3 millions de binationaux (selon les dernières données de l’Institut national d’études démographiques (Ined) recensées en 2008) pourraient être concernés.

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45 points
Oui
il y a 12 jours
Pour être honnête, je n'ai pas fait mon service militaire car je me suis arrangé pour ne pas le faire, non pas parce que je n'aimais pas l'Armée (au contraire!), mais pour des raisons professionnelles
Lire 514 arguments Oui
Non
il y a 25 jours
Né en 1979 - "année blanche" - j'ai la chance de n'avoir aucun document relatif à mes états de service militaire à fournir lors d'une démarche administrative... Étudiant, j'aurai détesté mettre en su
Lire 146 arguments Non

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